ARTICLE LE FIGARO
“Florian Schneider sera resté un homme mystérieux jusqu’au bout. Décédé il y a une semaine et enterré dans la plus stricte intimité, il a été annoncé mort ce mercredi 5 mai seulement. En 1977, David Bowie lui avait dédié un superbe morceau instrumental, V-2 Schneider sur son album de 1977, Heroes. Le musicien anglais n’était alors pas le seul à revendiquer l’influence de Kraftwerk, qui fut une formation pionnière de la musique électronique européenne, rangée un peu hâtivement dans la catégorie «krautrock».
Fils de Paul Schneider-Esbelen, architecte à qui l’on doit le design de l’aéroport de Cologne, Florian Schneider était né en 1947. Étudiant à Düsseldorf, ce multi-instrumentiste (flûte, violon et guitare) s’était illustré dans plusieurs formations de la ville. Après son premier groupe, Pissoff, il avait rejoint The Organisation, au sein de laquelle il avait rencontré Ralf Hütter. Ensemble, les deux hommes allaient bientôt former Kraftwerk, et commencer à expérimenter avec un instrumentarium électronique. Après trois albums en duo, Kraftwerk allait devenir un quartet pour Autobahn, en 1974, un des disques les plus influents de la décennie. Composé au synthétiseur, et faisant part d’une réflexion sur le monde d’alors, le disque allait devenir un grand succès populaire dans le monde anglo-saxon. Conjugué au triomphe du premier disque de Jean-Michel Jarre deux ans plus tard, il contribua à faire savoir que les racines de la musique électronique étaient bien en Europe.
En quelques années, et une série d’albums très réussis, Krafterk allait imposer un son robotique de plus en plus élaboré, avec le chant de Hütter, qui s’exprimait en allemand et en anglais. Radio-Activity (1975), Trans-Europe Express (1977) et The Man-Machine (1978) sont devenus des classiques, indispensables à toute discothèque. Toute la pop synthétique des années 1980 devra quelque chose à ces héros discrets, qui travaillaient d’arrache pied dans leur studio de Düsseldorf, Kling Klang, fuyant la presse et les codes du show business.
Samplé par Afrika Bambaata, le thème de leur morceau Trans-Europe Express donna naissance au premier tube de l’histoire du hip hop, Planet Rock. Quant à leur Computer World, il laissa une marque indélébile sur les développements de la house et de la techno des scènes de Detroit et de Chicago. Paradoxalement, alors que leur empreinte est dans toute la musique de l’époque, ils seront discrets dans les années 1980, avec seulement deux albums, Computer World(1981) et Electric Café (1986). Après avoir repris les tournées en 1990, le groupe publia son dernier album studio en date, Tour de France Soundtrack, inspiré par l’amour du vélo de Ralf Hütter, en 2003. Trois ans plus tard, Schneider quitta le groupe, pour des raisons qui n’ont jamais été évoquées. Kraftwerk continua sans lui, laissant Hütter seul maître à bord, désormais entouré de trois collaborateurs.
Jean-Michel Jarre, très ému de cette disparition a tweeté: «Mon cher Florian, ton Autobahn ne s’arrêtera jamais… Le Tour de France ne sera plus jamais le même…» Le producteur et DJ italien Giorgio Moroder a de son côté publié sur les réseaux sociaux une photo de lui aux côtés de l’Allemand, avec cette légende pour tout commentaire: «L’un de mes héros nous a quittés…»
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