Samedi! Vive le week-end :)

Je me disais que l‘Ile des morts était une oeuvre plus belle dans mon souvenir que dans la réalité et ouf une solution pour moi sur YouTube:”I hate my art” | What to do if you hate your own art? Grrr. Une réponse à tout: Google , médecin et devin.Quelle que soit la gestion que vous posez, tac , une réponse. Les Mots du soir d’hier:

Hola !!!!Ce soir Bouvard et Pécuchet.( Flaubert ) Alors là pour choisir c’est l’enfer car c’est une merveille. Barthes ( hier ) s’y est intéressé:
“Emblème de la modernité en littérature, le roman de Flaubert apparaît en même temps comme une encyclopédie critique des langages et un modèle expérimental d’écriture, qui constitue une pièce majeure pour Barthes dans sa réflexion sur sa propre écriture et sur la bêtise. »Mais aussi bien sûr 

F&W

Et misère de misère moi qui harcèle tout le monde avec les abécédaires, je re-découvre que dans son dictionnaire des idées reçues un abécédaire gigantesque/On y trouverait donc par ordre alphabétique, sur tous les sujets possibles, tout ce qu’il faut dire en société pour être un homme convenable et aimable.

ARTISTE. Sont tous désintéressés. LANGOUSTE. Femelle du homard. FRANCE. Veut un bras de fer pour être régie. ÉRECTION. Ne se dit qu’en parlant des monuments, etc. (Voir Dictionnaire des idées reçues, page 420.)

FLAUBERT:Je vais commencer un livre qui va m’occuper pendant plusieurs années…/…C’est l’histoire de ces deux bonshommes qui copient une espèce d’encyclopédie critique en farce. Vous devez en avoir une idée ! Pour cela il va me falloir étudier beaucoup de choses que j’ignore : la chimie, la médecine, l’agriculture. Je suis maintenant dans la médecine, mais il faut être fou et triplement frénétique pour entreprendre un pareil bouquin. » (Lettre à Mme Roger des Genettes, Correspondance, IV, p. 121.)
 Aimant, depuis l’enfance, à flétrir l’esprit bourgeois, à critiquer chez ses contemporains les idées sans art, les pensées stupides et niaises, Flaubert avait trouvé, dans Bouvard et Pécuchet, le sujet convenant le mieux à sa nature. Aveuglé par un désir inaltérable de raillerie, poussé par la haine de la bêtise humaine, le plan de son roman s’élargit démesurément, et c’est par morceaux que nous trouvons : feuillets, journaux, notes, prospectus, circulaires, formules administratives, annonces commerciales, enseignes, phrases informes, notes sur la chimie, la médecine, le jardinage, fragments de discours politiques, bourrés de lieux communs, de termes impropres, formant la prodigieuse documentation de Bouvard et Pécuchet.

ALLONS- Y

Alors le cœur de Pécuchet se gonfla d’aspirations désordonnées, et, quand la nuit était venue, Bouvard le surprenait à sa fenêtre contemplant ces espaces lumineux qui sont peuplés d’esprits. Swedenborg y a fait de grands voyages. Car, en moins d’un an, il a exploré Vénus, Mars, Saturne et vingt-trois fois Jupiter. De plus, il a vu à Londres Jésus- Christ, il a vu saint Paul, il a vu saint Jean, il a vu Moïse, et, en 1736, il a même vu le jugement dernier.

Aussi nous donne-t-il des descriptions du ciel. On y trouve des fleurs, des palais, des marchés et des églises, absolument comme chez nous. Les anges, hommes autrefois, couchent leurs pensées sur des feuillets, devisent des choses du ménage ou bien de matières spirituelles, et les emplois ecclésiastiques appartiennent à ceux qui, dans leur vie terrestre, ont cultivé l’Écriture sainte. Quant à l’enfer, il est plein d’une odeur nauséabonde, avec des cahutes, des tas d’immondices, des personnes mal habillées. Et Pécuchet s’abîmait l’intellect pour comprendre ce qu’il y a de beau dans ces révélations. Elles parurent à Bouvard le délire d’un imbécile. Tout cela dépasse les bornes de la nature ! Qui les connaît cependant ? Et ils se livrèrent aux réflexions suivantes : Des bateleurs peuvent illusionner une foule ; un homme ayant des passions violentes en remuera d’autres ; mais comment la seule volonté agirait-elle sur de la matière inerte ? Un Bavarois, dit-on, mûrit les raisins ; M. Gervais a ranimé un héliotrope ; un plus fort, à Toulouse, écarte les nuages. Faut-il admettre une substance intermédiaire entre le monde et nous ? L’od, un nouvel impondérable, une sorte d’électricité, n’est pas autre chose, peut-être ? Ses émissions expliquent la lueur que les magnétisés croient voir, les feux errants des cimetières, la forme des fantômes. Ces images ne seraient donc pas une illusion, et les dons extraordinaires des possédés, pareils à ceux des somnambules, auraient une cause physique ? Quelle qu’en soit l’origine, il y a une essence, un agent secret et universel. Si nous pouvions le tenir, on n’aurait pas besoin de la force, de la durée. Ce qui demande des siècles se développerait en une minute ; tout miracle serait praticable et l’univers à notre disposition. La magie provenait de cette convoitise éternelle de l’esprit humain. On a, sans doute, exagéré sa valeur, mais elle n’est pas un mensonge. Des Orientaux qui la connaissent exécutent des prodiges. Tous les voyageurs le déclarent, et, au Palais-Royal, M. Dupotet trouble avec son doigt l’aiguille aimantée. Comment devenir magicien ? Cette idée leur parut folle d’abord, mais elle revint, les tourmenta, et ils y cédèrent, tout en affectant d’en rire. Un régime préparatoire est indispensable. Afin de mieux s’exalter, ils vivaient la nuit, jeûnaient, et, voulant faire de Germaine un médium plus délicat, rationnèrent sa nourriture. Elle se dédommageait sur la boisson, et but tant d’eau-de-vie qu’elle acheva promptement de s’alcooliser. Leurs promenades dans le corridor la réveillaient. Elle confondait le bruit de leurs pas avec ses bourdonnements d’oreilles et les voix imaginaires qu’elle entendait sortir des murs. Un jour qu’elle avait mis, le matin, un carrelet dans la cave, elle eut peur en le voyant tout couvert de feu, se trouva désormais plus mal et finit par croire qu’ils lui avaient jeté un sort. Espérant gagner des visions, ils se comprimèrent la nuque réciproquement, ils se firent des sachets de belladone, enfin ils adoptèrent la boîte magique : une petite boîte d’où s’élève un champignon hérissé de clous et que l’on garde sur le cœur par le moyen d’un ruban attaché à la poitrine. Tout rata ; mais ils pouvaient employer le cercle de Dupotet. Pécuchet, avec du charbon, barbouilla sur le sol une rondelle noire afin d’y enclore les esprits animaux que devaient aider les esprits ambiants, et, heureux de dominer Bouvard, il lui dit d’un air pontifical :

— Je te défie de le franchir !

Bouvard considéra cette place ronde. Bientôt son cœur battit, ses yeux se troublaient.

— Ah ! finissons !

Et il sauta par-dessus pour fuir un malaise inexprimable.

Pécuchet, dont l’exaltation allait croissant, voulut faire apparaître un mort. Sous le Directoire, un homme, rue de l’Échiquier, montrait les victimes de la Terreur. Les exemples de revenants sont innombrables. Que ce soit une apparence, qu’importe ! il s’agit de la produire. Plus le défunt nous touche de près, mieux il accourt à notre appel ; mais il n’avait aucune relique de sa famille, ni bague, ni miniature, pas un cheveu, tandis que Bouvard était dans les conditions à évoquer son père ; et comme il témoignait de la répugnance, Pécuchet lui demanda :

— Que crains-tu ?

— Moi ? Oh ! rien du tout ! Fais ce que tu voudras !

Ils soudoyèrent Chamberlan, qui leur fournit en cachette une vieille tête de mort. Un couturier leur tailla deux houppelandes noires, avec un capuchon comme à la robe de moine. La voiture de Falaise leur apporta un long rouleau dans une enveloppe. Puis ils se mirent à l’œuvre, l’un curieux de l’exécuter, l’autre ayant peur d’y croire.

Le muséum était tendu comme un catafalque. Trois flambeaux brûlaient au bord de la table poussée contre le mur, sous le portrait du père Bouvard que dominait la tête de mort. Ils avaient même fourré une chandelle dans l’intérieur du crâne, et des rayons se projetaient par les deux orbites. Au milieu, sur une chaufferette, de l’encens fumait. Bouvard se tenait derrière ; et Pécuchet, lui tournant le dos, jetait dans l’âtre des poignées de soufre. Avant d’appeler un mort, il faut le consentement des démons. Or, ce jour-là était un vendredi, jour qui appartient à Béchet : on devait s’occuper de Béchet premièrement. Bouvard ayant salué de droite et de gauche, fléchi le menton et levé les bras, commença :

— Par Éthaniel, Anazin, Ischyros…

Il avait oublié le reste…/…

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