Extrait chant IV/ Le purgatoire: dante
Et l’un d’entre eux qui me semblait las
était assis embrassant ses genoux
et tenant entre eux son visage baissé.
“Mon doux seigneur” dis-je, “jette les yeux sur cet homme-ci à l’air plus indolent
que si paresse était sa soeur”.
Alors il se tourna vers nous et nous considéra,
en levant les yeux le long de sa cuisse, et dit:”Va donc là-haut, toi qui est si vaillant.”
Je reconnus alors qui il était, et cette angoisse
qui pressait encore ma respiration
ne put m’empêcher d’aller vers lui; et quand
je fus près de lui, il leva à peine la tête,
et dit:” As tu bien vu comme le soleil
mène son char ici de la main gauche?”
Ses gestes paresseux et ses brèves paroles
me portèrent un peu à sourire;
puis je dis:”Belacqua, je ne plaindrai plus
désormais: mais dis-moi: pourquoi es-tu assis
en ce lieu? attends-tu une escorte?
ou bien as-tu repris ton ancienne habitude?”
Et lui: “O,frère, monter là-haut, qu’importe?
il ne me laisserait pas aller aux tourments,
l’ange de Dieu qui siège sur le seuil.
Le ciel doit d’abord tourner autant de fois
autour de moi qu’il a fait dans ma vie,
puisque j’ai retardé sanscesse les bons soupirs,
à moins qu’une prière ne m’aide auparavant,
venue d’un coeur qui vive dans la grâce.
Que vaut une autre, que le ciel n’entend pas?”
Déjà le poète montait devant moi
et disait:” Viens donc, tu vois que le soleil
touche le méridien, et que sur le rivage
la nuit, du pied, recouvre le Maroc.”
Days / Faire un truc par jour
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Faire un truc par jour
« C’est comme si je me sentais plus léger en notant tout sincèrement » – S Maraï
Catégorie : 2008
WALDEN
“Quand j’écrivis les pages suivantes,ou plutôt en écrivis leprincipal, je vivais seul, dans les bois, à un mille detout voisinage, en une maison que j’avais bâtie moi-même, au bord de l’étang de Walden,à Cocord, Massachusets, et ne devais ma vie qu’au travail de mes mains. J’habitai là deux ans et deux mois.A présent me voici pour une fois encore de passage dans le monde civilisé.”
H.D Thoreau
SPHINX
MAINTENANT/SUITE MONTAGE/ HOMME DE DOS
Je coupe 20 minutes du film. La première partie est bien trop longue et plus du tout efficace. Mais c’est toujours difficile. J’ôte également le séquence de L’homme illustré de Bradbury.
Je montre le montage à R. qui me dit voir deux films. Et me suggère de ne laisser parler que C.A
Je fais des essais et aussi ma voix lisant des lettres envoyées à G. avant notre rencontre.
Redessins et poursuis les animations très sommaires (séance/nazis/etc)
Montage suite/” Justine, où les infortunes de G.”
NOTES / Virginia woolf
“C’est ainsi qu’un soir de grand brouillard juste avant Noël, Lord Surrey et son valet se rendirent à Saffron Walden.”
Comment lire un livre
Je vous écrirai après votre mort
Nicole Stéphane/ Fragments d’interview
Voici en vrac des images du Dossier Nicole Stephane. Ce travail concerne Nicole Stéphane ( 1923 – 2007 ) que j’étais allée interviewer en 2001 pour France-Culture ( Autour des Enfants Terribles / Surpris par la nuit ). Trouvant cette personne rare et singulière, je lui ai demandé s’il était possible de poursuivre les interviews et de la filmer. Je me suis donc rendue régulièrement chez elle de 2003 à 2007, afin d’entendre sa vie de résistante, comédienne puis productrice.D’entendre aussi tout simplement ses réctions faces aux choses. Pendant toutes ces années j’ai filmé , enregistré et également pris des notes. Nicole Stéphane est décédée en Mars 2007. J’ai alors commencé à écrire Ces notes deviennent une lettre: “Je vous écrirai après votre mort”. Une lettre qui est aussi une sorte de livre d’images. Je réunis à présent tous les éléments qui constitueront le film. Un documentaire ? Je pense qu’il ne s’agit pas à proprement parler d’un documentaire. Nicole Stéphane existe sans moi et l’on trouve quelques informations la concernant. Elle a été sollicitée à diverses reprises à propos de Proust, Cocteau, de la Guerre d’Espagne… Ce que je souhaite c’est parler d’elle évidemment, de sa vie et de ses engagements. En 4 ans de rencontres régulières s’établissent confiance et intimité. Je suis donc le témoin privilégié de “son monde” de “displaced person“, comme elle se qualifiait elle-même, et la regarde au travers du mien. J’associe à sa parole mes images – séquences, photos et dessins- J’associe à ses images mes notes, mon récit. Ce film sera donc une sorte d’entre-deux personnes: Ses réactions à mon contact et ma découverte constante de cette vie intense que fût la sienne.
JE VOUS ECRIRAI APRES VOTRE MORT
Première page du livre Nicole, J’avais promis de vous écrire. Mais où êtes-vous ? Très loin… Juste à côté… Me voyez-vous ? Si c’est le cas vous devez bien vous moquer de moi, submergée que je suis par ces documents, ces bandes accumulés pendant quatre années, perdue dans mes notes, mes interrogations et terrorisée à l’idée de faire un film que vous n’aimeriez pas. Si vous me voyez, vous voyez aussi sur ma table le cow-boy dessiné pour vous, posé sur une chaise le bonnet que vous m’aviez offert, la théière, les ciseaux… Nous sommes Dimanche, peu importe pour vous maintenant. Il fait un gris bleu et froid. Depuis plusieurs jours la maison est vide et cependant je suis avec vous, avec votre voix que je fais avancer, que je réécoute. Il n’y a aucun bruit, un chien de temps en temps… Je sais que la nuit venue vous reviendrez dans votre chambre-forêt, vêtue de la cape noire: la cape aux oiseaux d’or du blason de votre enfance. Vous glisserez comme une sainte de procession. Cette procession où vous avez suivi votre mère, Cocteau, Doudou, Marguerite, Susan et tout ceux qui vous manquaient tant. “Death”, comme vous disiez, est passée et vous a embarquée vous et votre petite radio… Je me suis assise, j’ai pleuré et me suis photographiée: (Retardateur, dix secondes, debout, bras le long du corps, votre foulard à gros pois rouges posé sur ma tête comme un voile.) J’avais envie de vous téléphoner pour vous annoncer votre mort. Je me rassurais en pensant que vous étiez contente de votre compagne de voyage, Lucie Aubrac, partie le même jour. — Nicole et Lucie, alors ça “c’est le chapeau de la fourmi”… C’est ce que vous auriez dit. J’ai traîné toute la journée. Il pleut. Je suis trempée. C’est fini. J’ai prévenu l’AFP .
“Vous trouverez à gauche de la demeure d’Hadès une source, et près d’elle, se dressant, un cyprès blanc: De cette source ne vous approchez surtout pas. Vous trouverez une seconde source, eau froide qui coule du lac de Mnémosyne: Devant elle se tiennent des gardes. Dites: “ Je suis fille de la Terre et du Ciel étoilé. Ma race est céleste, et cela vous le savez, vous aussi. Je brûle de soif et je défaille. Donnez moi donc à l’instant l’eau froide qui coule du lac de Mnémosyne.” Et ils vous donneront à boire de la source divine, et de ce moment, avec les autres héros, vous serez souveraine.”
Aby Warburg song
Quand Aby Warburg, pionnier de l’iconologie, devient le patient de Ludwig Binswanger, psychiatre et fondateur de l’analyse existentielle. Par Robert MAGGIORI
QUOTIDIEN : jeudi 18 janvier 2007
Ludwig Binswanger, Aby Warburg La Guérison infinie Edition établie par Davide Stimilli, postface de Chantal Marazia, traduit par Maël Renouard (allemand) et Martin Rueff (italien). Bibliothèque Rivages, 318 pp.
18 avril. «Ce soir, 1 g de Véronal.» 24 avril. «Nuit plus calme.» 28 mai. «Ont ressurgi l’agitation et l’état d’esprit délirant qui avaient presque disparu.» 19 novembre. «Se plaint de visions terrifiantes : trois petits enfants ont été enfermés dans la salle de billard, ils n’avaient plus que la peau et les os. Croit que ces enfants ont été massacrés et ensuite dévorés par lui-même.» Ses premiers troubles graves s’étaient manifestés à la fin de la Grande Guerre. Un jour de novembre 1918, se croyant responsable de la défaite allemande, il avait menacé de se tuer et de tuer ses proches. Il arrive à la clinique Bellevue de Kreuzlingen, en Suisse, le 21 avril 1921. Il est enregistré comme un cas de Dem. [entia] Pr. [aecox], corrigé ensuite comme Schizophrénie.
Le Privatsanatorium Bellevue, sur le lac de Constance, est célèbre. Fondé en 1857, il a été démoli en 1990. Il recrutait sa clientèle dans la haute société européenne, les milieux intellectuels et artistiques. Divers patients de Freud y ont séjourné, la patiente de Joseph Breuer, Bertha Pappenheim («Anna O.»), le danseur Vaslav Nijinski, le peintre Ernst Kirchner… A son nom est lié celui de la famille Binswanger. Ludwig Binswanger, après son père Robert et son grand-père Ludwig, avant son fils Wolfgang, le dirige de 1911 à 1957. C’est lui qui accueille le professeur Warburg. Sur la fiche clinique, on lit : «Raconte qu’on va bientôt l’exécuter ; que l’oeuvre qu’il fait imprimer en ce moment sera mise au pilon parce qu’on le tient pour un criminel, et que l’on a déposé du poison dans sa nourriture.»
Qu’une «personnalité psychotique» ait un jour ou l’autre affaire à un psychiatre est chose banale. Mais prend un caractère exceptionnel si le médecin est Ludwig Binswanger, qui a profondément renouvelé l’approche de la maladie mentale, si le patient est Aby Warburg, le génial inventeur d’une nouvelle science des images, l’iconologie, et si l’on peut établir un lien entre la force psychique, la «vie» des images, leur «nature de fantôme», leur «capacité de revenance, de hantise» (1) et le pouvoir de blesser ou de guérir. On s’en convainc en lisant la Guérison infinie, qui retrace de façon inédite l’«histoire clinique d’Aby Warburg» à partir de lettres et de «fragments autobiographiques» de Warburg, d’une correspondance entre Warburg et Binswanger, et, surtout, du «dossier clinique» rédigé au jour le jour par Binswanger et ses collaborateurs.
Héritier d’une puissante famille de banquiers, Aby Warburg cède son droit d’aînesse à son frère Max, à condition que celui-ci lui achète tous les livres dont il aura besoin. Il constitue ainsi à Hambourg une immense bibliothèque, qui peu à peu devient un institut de recherche et un centre de vie intellectuelle. A l’avènement du nazisme, l’Institut Warburg sera contraint, dans mille difficultés, de se transférer à Londres. Dans cette institution mythique se sont nourris, parmi tant d’autres philosophes, sociologues de la culture ou historiens d’art, Fritz Saxl et Ernst Gombrich (qui en furent les directeurs), Erwin Panofski, Frances A. Yates, Raymond Klibanski, Francis Haskell, Rudolf Wittkower, Ernst Kris… : elle est le principal legs, encore actif (2), d’Aby Warburg. Mais cela ne saurait cacher que, par ses propres écrits, en cours de publication, Warburg a totalement modifié la vision de l’histoire de l’art, en indiquant la voie qui permet de retrouver dans les arts figuratifs la «concrétion» d’une civilisation tout entière, en prêtant attention aux mythes, à la magie, aux symbologies religieuses ou astrologiques, en ouvrant l’histoire de l’art à la science et à l’anthropologie, à la sociologie, à la psychanalyse.
En 1895, Aby Warburg fait un voyage au Nouveau-Mexique, et entre en contact avec les Indiens Pueblo. Il est très frappé par leurs cérémonies notamment le «rituel du serpent», où, au cours d’une danse masquée, le serpent vivant est «initié» et mué en éclair, annonciateur de la bienfaisante pluie , ainsi que par le pouvoir qu’ils attribuent aux images, et a l’impression de rencontrer une culture située entre magie et raison, où causalité logique et causalité fantastique restent en synchronie. Du matériau recueilli, il ne fera rien, hors quelques expositions de photographies.
Assistant d’Eugen Bleuler, ami et «fils spirituel» de Freud, mais aussi de Carl Gustav Jung, Ludwig Binswanger sur la pensée duquel travailla Michel Foucault établit dans l’approche du trouble mental une «révolution philosophique», puisqu’il y intègre la phénoménologie de Husserl et l’ontologie fondamentale de Heidegger, créant ainsi une «analyse existentielle» (Daseinanalyse), une analyse de l’ être-au-monde capable de reconnaître les modes qu’a l’homme de se rapporter au monde et aux autres, au nombre desquels entre la maladie mentale. Il détruit l’idée que le malade appartienne à un monde lointain, éloigné et radicalement séparé du monde normal, et interprète l’aliénation comme tentative ou seul projet possible d’habiter le monde.
A l’époque où il soigne Warburg, Binswanger n’est pas encore Binswanger, et laisse voir quelques attitudes psychiatriques réductrices ou objectivantes mais aussi la percée d’une «communication existentiale», fondée sur l’écoute et l’empathie. Dans une lettre au philosophe Martin Buber, il distingue guérison (Heilen) et salut (Heile), thérapie et soin de l’âme (Seelsorge). On ne sait s’il a guéri ou sauvé Warburg. Aussi, dans la Guérison infinie , est-ce surtout la personnalité d’Aby Warburg qui émerge. Celui-ci est persuadé que sa guérison coïncidera avec la possibilité retrouvée de se consacrer à son travail scientifique. D’où le pari, formidable, qu’il lance : pour (é) prouver sa guérison, il demande l’autorisation de faire une conférence à la clinique, «devant un public de non-spécialistes» . Il la donne avec succès le 21 avril 1923. Elle porte sur le «rituel du serpent» et exploite tout le matériau anthropologique recueilli lors de son voyage chez les Indiens, vingt-six ans auparavant. De cette conférence, qui explore les origines du paganisme et de la magie, jusqu’aux liens avec l’art du Quattrocento, Ernst Gombrich dira qu’elle «contient en réalité la formulation la plus explicite que Warburg ait jamais donnée de ses idées» .
Peut-être la maladie mentale avait-elle donné à Aby Warburg une capacité nouvelle de scruter les abîmes des états «primitifs» dominés par la nécessité de vaincre les peurs ancestrales, connues des civilisations comme de chaque individu. Il était certain, en tout cas, qu’à les décrire, il aurait retrouvé son équilibre. S’est-il sauvé ? A-t-il guéri miraculeusement de sa schizophrénie, ou, plus certainement, de son «état mixte maniaco-dépressif» ? Il sort de la clinique le 12 août 1924. A son frère Max, il écrit : «Voilà un symptôme clair que ma nature veut encore une fois se tirer elle-même de ce marécage.»
(1) Cf. Georges Didi-Huberman, «L’Image survivante. Histoire de l’art et temps des fantômes selon Aby Warburg», Minuit 2002.
WARBURG-MIROIR 2008
contact Warburg
Ghost song
Les Mudheads se produisent dans des intermèdes comiques souvent obscènes.
Ils portent un masque de coton enduit de boue dans lequel s’ouvrent des orofices circulaires protubérants remplis de coton brut, de graines et de poussière prélevée dans les empreintes des pas laissés par les Indiens autour du pueblo:
Ils mangent, ils mendient et boivent de l’urine, se goinfrent et se livrent à des obscénités de façon désordonnée.
Ils se fouettent les uns les autres, arrachent des pans de leurs vêtements, s’arrosent d’eau sale, adressent des remarques salaces aux spectateurs et jouent des saynètes comiques avec des ânes et des chiens. Ils racontent des histoires pour quelques épis de maïs sous les coups de fouet sévères de personnages masqués, s’aspergent de sang, urinent les uns sur les autres, se mortifient avec des branches de cactus…. ( J.F.Fewkes/ Tusayan Katcinas)
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