Notes

Arthur Koestler

L’Étreinte du crapaud, dont l’enquête frissonnante retrace le tragique destin du biologiste autrichien Paul Kammerer, et Les Racines du hasard, une excursion scientifique dans l’univers de la parapsychologie.

Chapitre 1 

Le 23 septembre 1926 au début de l’après-midi un cantonnier trouva sur un sentier de montagne en Autriche un cadavre bien vêtu, en complet foncé, assis, le dos calé contre la paroi verticale d’un rocher, la main droite tenant encore le pistolet avec lequel l’homme s’était brûlé la cervelle. Une des poches du veston contenait une lettre adressée « à la personne qui trouvera mon corps » :

Le Dr Paul Kammerer demande qu’on ne le transporte pas chez lui, afin d’épargner à sa famille la peine de le voir. Le plus simple et le moins coûteux serait de l’utiliser dans le laboratoire de dissection d’un institut universitaire. Au fait, je préférerais rendre au moins ce petit service à la science. Peut-être mes dignes collègues universitaires trouveront-ils dans mon cerveau quelque trace des qualités qu’ils n’ont pas décelées de mon vivant dans les manifestations de mes activités mentales. Quoi qu’il arrive au cadavre — qu’il soit enterré, brûlé ou disséqué — son propriétaire n’appartenait à aucune confession religieuse et souhaite qu’on lui épargne une cérémonie qui, de toute façon, lui serait probablement refusée. Ce voeu ne traduit aucune hostilité à l’égard du prêtre en tant qu’individu ; comme tout le monde il est humain et c’est souvent un être bon et noble.

La lettre était signée Dr Paul Kammerer. Un post-scriptum demandait à sa femme de s’abstenir de porter des vêtements noirs ou autres signes de deuil.

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