Le théâtre macabre et savant d’Hélène Delprat
Blog du Figaro: Le grand theâtre du monde
Armelle Heliot
Galerie Christophe gaillard, jusqu’à la fin de la semaine, elle expose, elle s’expose. Tout un théâtre dont elle est le personnage central dans des métamorphoses étonnantes. Alice au pays des morts, des fantômes, au royaume de l’imagination, sans peur de la cruauté du monde.
Elle est d’essence théâtrale. Un peintre, un dessinateur, un sculpteur, une découpeuse de papier, une dentellière en quelque sorte, une farceuse, une féroce, une candide, une lucide, une fille au crâne rasé, une fée.
Pour quelques jours encore vous pouvez pénéter dans son royaume. Elle vous fait passer de l’autre côté des miroirs. Chez elle, blanc et noir, jour et nuit, vie et mort, éveil et sommeil, lucidité et songe, raison et imagination ne sont pas opposés. On est comme dans l’inconscient, on vit sans contraires, sans contraintes autres que celles de très étranges cérémonials.
vue du rez-de-chaussée de la galerie ( photo DR):
A la fin de l’automne dernier, dans un gymnase de Montmartre, au coeur de la “Nuit Blanche”, Hélène Delprat avait investi l’espace entre théâtre et créations plurielles, projetant, dans une scénographie complexe comme elle sait si bien les organiser, un film que l’on retrouve aujourd’hui au sous-sol de la galerie de Christophe Gaillard.
On ne raconte pas Hélène Delprat. Décrire serait affaiblir. On n’analyse pas Hélène Delprat. Commenter serait apauvrir.
Il faut entrer dans son monde et accepter les rugosités, les scènes violentes, la recomposition du monde.
Du rez-de-chaussée où sont les oeuvres, dessins, techniques mixtes, formats très différentes, au sous-sol où l’on découvre le film, les échos, un dialogue comme si cette ouvreuse de portes nacrées pouvait seule nous conduire jusqu’au point où l’émotion et le sens se rejoignent.
Il y a du sphinx en cette femme au crâne rasé qui se sert d’elle comme un “personnage” et s’inscruste dans ses films, sur les traces de grands aînés, les passeurs de murailles. Un certain surréalisme, en fait, s’instille dans un monde voué aux apparitions dérangeantes, fascinantes, enfantines. Mais surréalisme n’est pas le juste mot, bien sûr.
C’est un cabinet de curiosités qui n’est pas circonscrit aux murs de la galerie, de l’atelier, du gymnase, de l’usine dans laquelle elle a travaillé…
On rencontre Cocteau et ses comédiennes, on erre dans une usine immense dans lequel elle a tracé ses chemins. Macabres et blagueurs, squelettes et loups sombre vous guettent. “On dirait que je suis……” On dirait que je suis la dompteuse de monstres et de gentils fantômes.
Le film vu d’abord au Gymnase Durantin s’intitule : “Les (Fausses) Conférences”.
Il y a de l’enfance en cette Hélène, LN qui déchiffre le monde comme un immense rébus. Labyrinthe de la pensée, du savoir, de la sensibilité. Passez donc la porte de la Galerie de Christophe Gaillard et embarquez-vous !
“Pour en finir avec l’extension du pire”. Un livre accompagne l’exposition. Il s’ouvre sur un texte de Dominique Païni, Le “Jeu lugubre” d’Hélène Delprat.